Zone Dubitative

Black Myth Wukong [PC]

S'il y a bien un jeu qui aura fait couler beaucoup d’encre en 2024, c’est Black Myth Wukong, et ce, pour diverses raisons. Déjà, c’est l’un des plus gros AAA chinois, ensuite, c'est aussi un showcase technique pour l’Unreal Engine 5. Le fait qu’il ait explosé des records de ventes et totalement péter le record de joueurs simultanés sur la plateforme Steam ? Ça joue également. Mais ne citer que ça, ce serait oublier les polémiques. Avec en 1er lieu, du NDA vraiment énervé avec des développeurs qui interdisent de parler de politique ou encore de féminisme (quand on sait que l’un des membres du studio a tenu des propos misogynes par le passé… pas très classe). Ensuite avec un incroyable imbroglio lié à l’absence de version Xbox. “C’est la faute de la Series S”, “Il y a des problèmes d’optimisation”, “Sony a acheté l’exclusivité”. Finalement, il semblerait que ce soit la dernière option. Cependant, avant de hurler avec la meute et d’accuser Sony de tous les maux, rappelons que ce n’est pas la première fois que le constructeur japonais contacte des développeurs afin de proposer son aide pour un portage console et que c’est une pratique légale que Microsoft pourrait utiliser également… À bon entendeur. Mais, nous nous égarons, revenons à nos moutons ou plutôt à notre singe dans le cas présent.

Car oui, Black Myth Wukong (que l’on va abréger par BMW) s’inspire du classique de la littérature chinoise qu’est “La pérégrination vers l’ouest” pour nous narrer une toute nouvelle version de l’histoire de Sun Wukong. Un personnage qui aura inspiré bien des œuvres dont la plus connue étant le Dragon Ball d'Akira Toriyama. Vendu comme un Souls like next gen, BMW a-t-il ce qu’il faut pour s’imposer dans ce domaine désormais presque saturé ? Apporte-t-il quelque chose de neuf ou se contente-t-il de singer (ah ah, oui je suis drôle) la concurrence ? C’est ce que nous allons voir lors de ce test effectué par votre serviteur sur une version PC non fournie par l’éditeur.

 

C’est de toute beauté (à lire en imitant la voix d'Eric Judor dans La tour Montparnasse infernale)

Évacuons déjà tout ce qui est lié aux graphismes et à la technique afin de pouvoir se focaliser sur le reste plus tard. Oui, BMW est beau, très beau même. Nous ne sommes pas au niveau du fantastique Hellblade 2, mais ce dernier étant un jeu narratif en couloir, la comparaison serait injuste. Toujours est-il que BMW est sans doute le plus beau jeu Unreal Engine 5 actuel derrière la dernière production de Ninja Theory. Les environnements sont riches, variés, les effets visuels réussis, les textures de qualité et l’animation des personnages parfaite. Cerise sur le gâteau, le jeu gère le path tracing, une forme de ray tracing encore plus poussée. Cependant, c’est une option qui restera réservée aux détenteurs de cartes graphiques haut de gamme et donc très chères. Et pour le commun des mortels, ceux qui n’ont pas 800 euros à mettre dans un GPU ? Eh bien, il y a deux façons de voir les choses. Soit, on considère que BMW est un gouffre à ressources puisque n’importe quelle config’ milieu de gamme se retrouvera à genoux si on essaie de le faire tourner en 1080p avec des détails graphiques réglés plus haut que le niveau medium. Soit, on s’extasie sur l’efficacité des dernières technologies d’upscaling et de génération d’images, car elles permettent alors de jouer au jeu dans de bien meilleures conditions une fois activées.

La vérité se trouve quelque part entre les 2 propositions. BMW est effectivement très gourmand et espérer le faire tourner en ultra juste comme ça demandera une config’ de brute épaisse, alors que le jeu est très beau certes, mais pas non plus révolutionnaire (prouvant, une fois encore, que l’UE5 est décidément décevant en termes d’optimisation). Mais, une fois le DLSS de nVidia ou le FSR d’AMD activé et couplé au frame generation, force est de constater que le jeu peut alors très bien tourner en réglages très élevés sur une configuration milieu de gamme classique. Un constat qui prouve encore une fois l’importance de telles technologies pour le futur du jeu vidéo, que ce soit sur console ou PC d’ailleurs.

Sur notre configuration PC, équipé d’un Ryzen 5 5600X3D, de 32 Go de ram et d’une RX 7600 XT, le jeu tourne en 1080p en réglages très élevés sur quasi toutes les options (hormis 3 ou 4 laissées sur élevé) de manière totalement fluide avec le FSR et le frame generation activés. À titre de comparaison, la version PS5 tourne avec beaucoup d’options en réglages bas, ce qui fait quand même perdre au jeu de sa superbe. On imagine que ce sera la même chose pour la future version Xbox. Car oui, l’exclu Sony est temporaire et il faut s’en réjouir parce que même si certains seront chafouins en se disant que la version console est un cran en dessous techniquement, le jeu reste agréable à l’œil, mais il est surtout un Souls like des plus réussis. Sans doute même le plus réussi depuis l’incroyable Sekiro de From Software.

 

Coup de maitre

BMW n’est pas une tentative facile de copie de ce qui a déjà marché ailleurs, le jeu du studio Game Science essaie clairement d’imposer son propre style et il y arrive. Bien sûr, les inspirations liées aux jeux de From Software sont bien là. Les check point qui redonnent de la vie, mais ressuscitent les ennemis ? Check. La petite fiole pour se soigner en quantité limitée ? Check. Les boss ultra-coriaces ? Check. Malgré ça, BMW arrive à tracer sa propre voie. Déjà grâce à son univers et son ambiance. En se basant sur l’histoire de Sun Wukong, le jeu propose quelque chose de totalement dépaysant, notamment pour des occidentaux. Personnages mi-homme, mi-animaux, divinités, monstres aux design incroyables, BMW frappe très fort au niveau de sa DA. Le jeu est séparé en six chapitres et chacun d’entre eux proposera quelque chose de différent visuellement et en termes d’ambiance. Forêt luxuriante, désert aride, plaines enneigées, cavernes sombres, chaque niveau propose une patte différente. Des niveaux assez vastes sans être non plus gigantesques et qui poussent à l’exploration. Que ce soit pour récupérer des ressources nécessaires pour le craft, trouver de l’équipement de qualité, affronter un boss optionnel ou parcourir l’une des nombreuses zones secrètes du jeu, tout explorer de fond en comble est fortement conseillé et récompensera toujours le joueur.

Mais là où BMW frappe vraiment très fort et où il n’a pas à rougir de la comparaison avec la concurrence, c’est sur son gameplay. Le personnage du joueur, Wukong, est rapide et vif. Le système de combat se base sur des combos et sur l’utilisation de compétences. Les coups rapides font peu de dégâts, mais permettent d’enchaîner et de gagner de la concentration. La concentration est une ressource qui va permettre d’utiliser les coups chargés, des coups bien plus lents, mais aussi bien plus puissants. Plus un coup chargé utilise de concentration, plus il fera mal, mais attention, car, bien évidemment, Wukong est vulnérable pendant la charge. Des combos mélangeants coups rapides et chargement sont également de la partie ainsi que différentes poses qui permettent de faire varier ces derniers. Un point sera déstabilisant pour certains : le jeu ne propose pas de parade, mais une esquive qu’il faudra apprendre à placer avec le meilleur timing possible. Un timing parfait vous permettra même de ralentir brièvement l’action et de gagner plus de concentration. Mais ça, ce n’est que la base, car au fur et à mesure que l’on progresse, Wukong va monter en niveau et gagner des points de compétences qu’il faudra distribuer. Et de ce côté-là, il y a de quoi faire tant les arbres de compétences sont nombreux. Il y a les choses classiques qui vont vous permettre d’étoffer vos combos, d’augmenter votre jauge de vie, d’endurance (car oui, donner des coups, esquiver ou sauter vous en fera consommer et il faudra toujours garder un œil sur cette ressource pendant les combats) mais aussi de mana. Car si Wukong sait se battre avec des bâtons et des lances, l’utilisation de capacités magiques sera primordiale, notamment contre les boss. Au menu : un sort d’immobilisation, un sort de clonage qui rappellera de bons souvenirs aux fans de Naruto ou encore un sort qui permet de laisser un leurre à sa place et de disparaître momentanément. Mais ce n’est pas tout ! Vous aurez également la possibilité d’équiper des esprits. Un esprit se récupère uniquement sur certains types d’adversaires particulièrement coriaces (des boss ou des ennemis de base avec une aura bleutée). Une fois un esprit absorbé, il peut être équipé et apporte 2 choses. Un bonus passif (par exemple un boost de défense ou d’attaque) et une brève transformation. Quand elle est activée, Wukong prend l’apparence de l’adversaire pendant quelques secondes pour porter un coup. Bien évidemment, chaque esprit est très différent des autres. Certains vous octroieront de puissantes attaques quand d’autres empoisonneront l’adversaire ou l’entraveront. Et ce n’est toujours pas tout, car il reste également une dernière capacité que nous n’avons pas évoquée, les transformations. Ces dernières se gagnent sur certains ennemis rares et parfois durs à trouver et à affronter, mais contrairement aux esprits qui ne sont qu’une brève manifestation d’une capacité d’un adversaire, les transformations durent bien plus longtemps. L’apparence de Wukong change ainsi que ses coups. Le personnage se joue alors d’une manière totalement différente. Certaines transformations sont très offensives et vous transforment en machine à découper, d’autres vous donnent accès à des coups à distance ou des pouvoirs incapacitants. Elles peuvent même vous rendre invulnérable à certains éléments comme le poison ou le feu.

Bref, les possibilités sont extrêmement nombreuses et si vous rajoutez à tout cela le fait qu’il y a aussi les différents slots d’équipements à gérer, il y a de quoi avoir le tournis. Vous allez également devoir crafter des armes et des armures et bien entendu, chaque arme et chaque set d’armure vous apportera différents bonus. Couplé au fait que tous les points de compétences peuvent être remis à zéro à tout moment pour êtres redistribués (et ce gratuitement), il y a de quoi faire jubiler les joueurs qui adorent maximiser leurs personnages dans certains domaines bien particuliers. D’ailleurs, il ne faudra pas hésiter à changer de build contre certains boss si jamais ça coince, car parfois, ce sera la clé pour réussir un combat bien plus facilement. Et les combats, il y en a dans BMW, beaucoup.

Si on devait comparer le jeu à un autre Souls like, ce serait assurément Sekiro. Dans un premier temps à cause de leurs gameplays ultra-plaisants et bien nerveux et dans un second temps via leur formule “boss rush”. Car dans BMW comme dans Sekiro, les ennemis de bases ne sont qu’une distraction entre 2 boss. Et des boss, mini boss ou encore boss secrets, vous allez en manger à la chaîne. Avec leur design des plus réussis et leurs palettes de mouvements ultra-impressionnantes, ils représentent clairement la plus grande réussite du jeu. Chaque affrontement est un pur régal tant le gameplay se veut nerveux et réactif. Et certains vous donneront beaucoup de fil à retordre tant ils sont particulièrement retors. Comme dans Sekiro, il faudra persévérer, analyser les patterns, trouver les bons timings. Et comme dans Sekiro chaque victoire vous donnera un sentiment d’accomplissement vraiment grisant. À noter quand même que BMW se veut moins difficile. Rappelons que l’on peut changer de build à la volée et même aller farmer un peu d’XP pour monter en niveau si on l’on bloque vraiment. Pour autant, le jeu reste un Souls like et sa difficulté reste corsée avec notamment certains boss de fin de niveau qui proposent des pics de difficulté assez abrupts qui pourraient décourager les moins persévérants.

Quoi qu’il en soit, avec ses chapitres variés, sa ribambelle de boss marquants et son gameplay au poil (de singe ! Ah ah, votre serviteur sera au Zenith de Limoges pour son prochain stand up), BMW sait imposer son propre style sans tirer sur la simple copie de ce qui a marché ailleurs. Le jeu a vraiment un côté addictif et bien évidemment, le new game + est de la partie. Si vous comptez poncer chaque chapitre de fond en comble, vous pouvez compter sur une durée de vie de 40-50 heures pour un premier run.

 


Le meilleur souls like depuis Sekiro
Alors faut-il crier au GOTY comme certains l’ont fait quand on parle de Black Myth Wukong ? Et bien, si on aime les Souls like, le jeu se positionne clairement comme l’une des plus grosses surprises de l’année. Que ce soit sur son aspect technique ou sur son gameplay, le jeu se révèle extrêmement solide. Mieux, il arrive à se démarquer de ses modèles pour proposer quelque chose de vraiment à part. Black Myth Wukong est, et de loin, le meilleur Souls like sorti depuis bien longtemps. À titre personnel, je l’ai largement préféré à un Elden Ring. Il se positionne d’ailleurs plutôt en héritier de Sekiro que de Dark Souls. Avec son univers dépaysant très bien mis en valeur par des graphismes de qualité et une DA vraiment très inspirée, Black Myth Wukong s’impose comme l’une des expériences les plus marquantes de 2024. Quand on sait que c’est le premier gros projet du studio Game Science, le résultat n’en est que plus impressionnant. Ne reste plus qu’à espérer la sortie d’une version Xbox Series dans les mois à venir, car ce serait extrêmement regrettable que les joueurs de la marque au X passent à côté d’un tel jeu.

 

 

Post publié par Damzé le 25/09/2024 01:24

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