The Outsider
On aurait presque tendance à l’oublier mais Netflix ce n’est pas uniquement des séries faites maison, c’est également des films. Régulièrement, et de plus en plus, la plateforme propose de nouveaux films originaux Netflix et arrive à attirer du beau monde dedans comme Forest Whitaker ou encore Natalie Portman. Cependant il faut bien avouer que niveau promo, l’impact est souvent moindre qu’au cinéma notamment en ce qui concerne les bandes-annonces. Du coup, il est relativement facile de louper quelque chose qui pourrait nous intéresser. Aujourd’hui je vais vous parler d’un film qui m’était passé sous le nez sans que je ne m’en aperçoive : The Outsider.
Un gaijin au pays des Yakuza
Japon de l’après guerre, 1954, Osaka. Nick est un américain qui s’est retrouvé enfermé dans un camp de travail. Les conditions de vie y sont extrêmement rudes voire parfois inhumaines. Un jour, il aperçoit un japonais en grand danger et le sauve. Plus tard, ce dernier lui demande son aide pour organiser sa sortie et prétend avoir des relations et être capable d’aider Nick en retour. Ce dernier s’exécute et quelque temps plus tard, il se retrouve libre. Il va alors découvrir que son nouvel ami japonais est un membre d’une importante famille de Yakuza et va plonger la tête la première dans cet univers inconnu. The Outsider est ce qu’on pourrait appeler un film à ambiance. Le rythme y est plutôt lancinant, certaines scènes assument leurs longueurs mais en contrepartie, la plongée dans ce Japon des années 50 et surtout dans sa mafia n’en est que plus captivante. Porté par une réalisation de grande qualité avec une mise en scène très soignée, une photographie absolument sublime et une bande-son aussi discrète qu’efficace, The Outsider se veut vraiment hypnotisant pour qui succombera à son atmosphère.
Certains plans sont tout simplement d’une beauté à couper le souffle et le film dans son ensemble dégage une énorme classe. Cerise sur le gâteau, les acteurs sont tout simplement excellents avec en tête d’affiche un Jared Leto impressionnant. Il incarne un Nick très avare en paroles, froid, méthodique et quand on incarne un personnage avec peu de dialogues, il n’y a pas 36 solutions, l’acteur doit dégager quelque chose. C’est le cas ici ! Leto, via son visage, ses expressions et sa gestuelle, donne à Nick une énorme présence à l’écran et un sacré charisme. Le reste du casting, à 99% japonais, fait également brillamment son travail, Tadanobu Asano en tête qui prouve encore une fois qu’il est un des acteurs japonais les plus doués de sa génération. Au travers de son scénario simple et classique (trop diront certains), The Outsider arrive à nous immerger au cœur d’une famille de Yakuza. Que ce soient les rites, l’organisation, tout y est fidèlement retranscrit comme par exemple le rite d’entrée au sein de la famille ou encore les tatouages.
En dépeignant des mafieux, le film ne fait pas l’erreur d’en faire des saints ou encore moins des héros mais il n’en fait pas non plus de bêtes gangsters. S’il y a forcément des « méchants », le spectateur prenant évidemment partie pour un camp, le tout reste situé dans une échelle de gris appréciable. The Outsider est aussi une histoire de transition, celle du Japon qui termine sa période d’après guerre… celle des familles de Yakuza présentes dans le film qui doivent évoluer entre changement de patriarche, changement d’époque et rivalités… Celle de Nick, étranger perdu et déraciné qui va évoluer vers une toute nouvelle vie. Le film a la bonne idée de garder des enjeux réalistes, ici pas de familles de Yakuza composées de centaines de membres, pas de contrôle du pays mais quelque chose à taille humaine, de « palpable », qui donne au tout un côté vase clos assez agréable et collant bien à l’ambiance et à la tonalité du scénario.
La carpe ne s’est pas totalement transformée en dragon
The Outsider aurait pu être l’un des plus grands films sur les mafieux. Malheureusement, il rate un peu trop le coche pour convaincre totalement. Dans un premier temps, on pourra lui reprocher son scénario un poil trop classique, et ce malgré le concept de base séduisant et fonctionnel du gaijin (étranger) qui devient un yakuza. L’histoire se déroule sans gros twist majeur imprévisible et on comprend un peu trop vite ce qui va se passer, même si elle reste intéressante de bout en bout en grande partie grâce à l’ambiance et aux acteurs. Ensuite, il est clair que certains ne seront pas fans du rythme extrêmement posé. Autant être clair, The Outsider est souvent contemplatif, on l’observe parfois avec curiosité et fascination comme on observerait une estampe japonaise. Ceux qui ne sont pas du genre à aimer profiter d’une bonne réalisation et d’un aspect visuel travaillé seront bien moins réceptifs au charme du film.
Enfin, ceux qui voudraient y voir un déchainement de violence et d’action peuvent passer leur chemin sans regret. Attention, non pas qu’il n’y ait pas de violence dans le film, bien au contraire, mais nous ne sommes pas ici dans un film d’action. Les scènes violentes et/ou sanglantes sont à l’image de Nick, avares en effets de manche et en artifices, sobres mais redoutablement efficaces. Inutile donc d’espérer du défouraillage massif à grands renforts de flingues ou autres séquences d’arts martiaux ultra chorégraphiées. The Outsider est ancré dans le réalisme et l’authenticité. Personne ne se mettra à coucher des dizaines d’adversaires en mode karaté, tout comme personne ne tuera des dizaines d’adversaires avec un simple flingue.
Post publié par Damzé le 20/10/2019 05:38
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